Au cœur de la crise pandémique, les mots du « public » ont fait un retour aussi inattendu que spectaculaire. C’est presque une surprise au terme de trois décennies de tournant néo-libéral qui ont fragilisé l’infrastructure publique de nos États et de nos démocraties en développant une forme de scepticisme généralisé à l’égard du lexique public perçu, au mieux, comme une pieuse hypocrisie, au pire, comme un gage d’inefficacité. Les mots sont pourtant toujours bien là qui peuplent notre quotidien -des espaces publics aux services publics, en passant par les déclarations d’utilité publique, les biens publics, etc. -, mais ils peinent aujourd’hui à tenir leur promesse.

Le podcast Public Pride propose de reprendre les chemins du « public », de faire l’inventaire de ses mondes et, au fil des émissions, de cartographier sa crise contemporaine. Parce que « public » est un mot carrefour de nos démocraties, ce podcast offre une vue de coupe des déliaisons contemporaines de l’État et du public, et interroge ce qu’il nous en coûte collectivement d’avoir ainsi perdu cette boussole commune. Plus avant, il conduit à explorer les voies d’une réinvention d’un nouveau circuit public de l’État. Croisant les perspectives d’une économiste (Anne-Laure Delatte), d’une juriste (Stéphanie Hennette) et d’un politiste (Antoine Vauchez), l’émission se décline ainsi comme un nouvel abécédaire du public. Les 6 premiers épisodes de 45 minutes prennent la forme de conversations avec des chercheur-es en sciences sociales qui ont bien voulu, au fil des dix derniers mois, revisiter leurs enquêtes en cours sous cet angle.

                  Public pride

Les épisodes

Behind the mic...

ANNE-LAURE DELATTE

économiste

Anne-Laure Delatte est directrice de recherche au CNRS, rattachée au laboratoire d’économie de l’université Dauphine, membre du réseau européen Center for European Policy Research et du GIS Eurolab. Ses travaux visent à analyser les interactions de l’action publique avec le circuit économique: dette publique sur les marchés financiers, optimisation fiscale des banques et des multinbationales, aides publiques aux entreprises etc. Elle a publié “L’Etat droit dans le mur” en 2023 où elle documente l’évolution de l’action publique en France depuis 1945. Elle est débatteuse dans l’émission “On n’arrête pas l’éco” d’Alexandra Bensaid sur France Inter.

STÉPHANIE HENNETTE

JURISTE

Stéphanie Hennette Vauchez est professeure de droit public à l’Université Paris Nanterre, et membre senior de l’Institut universitaire de France. La série Public Pride est une des déclinaisons de ses projets de recherche ROCKRELIGION et THEODIS, qui interrogent la mesure et la manière dont les reconfigurations de la distinction entre sphère publique et sphère privée affectent le droit des droits humains et de la lutte contre les discriminations. Sur ce thème, elle a notamment publié « The Mall » (Revue Française de Droit Administratif, 2020, p. 833), un article dans lequel elle propose une réflexion sur la privatisation de l’espace public et ses conséquences en termes de liberté d’usage et d’égalité d’accès, et l’ouvrage L’école et la république. La nouvelle laïcité scolaire (Dalloz, 2023), dans lequel elle revient sur l’articulation entre écoles publiques et écoles privées et son rôle dans la redéfinition du régime de laïcité scolaire. De manière générale, ses travaux portent sur le droit des droits humains, et notamment les questions de bioéthique, de laïcité et de non-discrimination. Elle s’est également intéressée à l’état d’urgence comme nouveau paradigme de gouvernement.

Publications récentes :

La démocratie en état d’urgence. Quand l’exception devient permanente, Seuil, 2022. 

Laïcité, Anamosa, 2023

(Avec Laurie Marguet), De Haute Lutte. La révolution de l’avortement (CNRS Editions, 2025)

ANTOINE VAUCHEZ

POLITISTE

Antoine Vauchez est politiste, directeur de recherche au CNRS et directeur du Centre européen de sociologie et science politique (Université Paris 1, Ehess). Ses travaux récents portent sur la frontière public-privé comme frontière clé de nos démocraties. A partir d’enquêtes sur le pantouflage des élites politiques et administratives comme sur les nouveaux modes d’action de l’Etat, il suit la formation de nouveaux mondes publics engagés dans sa mue libérale et européenne mais aussi l’intérêt croissant des grandes entreprises et du monde du conseil pour les affaires publiques. Ce faisant, il explore les logiques contemporaines du brouillage public-privé et questionne ce qu’il nous en coûte politiquement et démocratiquement.

Sur ce thème, il a publié (avec Pierre France) une enquête sur les circulations public-privé au sommet de l’Etat Sphère publique, intérêts privés (Presses de Sciences Po, 2017), un ouvrage synthétique sur la trajectoire contemporaine du mot « Public » dans la collection « le mot est faible » (Anamosa, 2022) et un dossier de la revue Actes de la recherche en sciences sociales (2024) intitulé « Affaires publiques, intérêts privés » qui suit la mise en négociation et en marché de la souveraineté des Etats, prolongeant ainsi un séminaire à l’Ehess (avec Benjamin Lemoine) « Les affaires de l’État. Savoirs et professionnels aux frontières public-privé : droit, économie et finance ».